Cormorans, par La Fille Renne

Ce qu’on appelle “fantôme” ici désigne la mémoire résiduelle d’actions motrices du corps inscrite au cœur de notre vie mentale et émotionelle.

Notre capacité à penser et à produire de l’imaginaire serait liée à la capacité de dissocier un mécanisme neuronal qualifié de prédiction sensorielle. Lorsque nous faisons un geste, notre cerveau essaye en quelque sorte d’anticiper la conséquence sensorielle de cette action, ce qui lui permet de s’ajuster et d’apprendre. Il s’appuie pour cela sur la mémoire qu’il a déjà engrengée de ses précédentes interactions.

En tant qu’espèce humaine, nous aurions acquis la capacité de séparer ce mécanisme commun aux autres animaux et de le dissocier de la nécessité de résoudre la prédiction dans le mouvement qu’elle anticipe (Ortega Douville, C., 2024 / 2025, Biosystems). Nous en faisons une image, qui servira de base au développement de l’imaginaire et la pensée.

La méthode fantôme désigne dans ce contexte une méthode psychothérapeutique expérimentale visant à apprendre à identifier les mémoires résiduelles d’actions, de gestes et d’expressions corporelles que nous nous interdisons d’avoir par peur de l’hosilité ou du rejet des autres. La raison en est la plupart du temps traumatique, souvent d’origine systémique (liée aux violences cis-sexistes, racistes, validistes, …), ce qui rend nos automatismes pour les contrôler et les supprimer d’autant plus difficile à reconnaître et à accepter.

Ces mémoires composent ainsi une image de notre corps dite fantôme, dans le sens où elles sont actives et surgissent malgré tout en nous. Seulement, nous passons énormément de temps et d’énergie à les maintenir à distance. C’est un effort d’auto-conditionnement actif que nous avons intériorisé et que nous menons au quotidien. En quelque sorte, il s’agit d’une version fantôme de nous-même, authentique mais que nous nous interdisons d’exprimer.

Apprendre à identifier ces mémoires est un premier pas pour apprendre à relâcher les réflexes que nous avons développés pour les maintenir sous contrôle. Le but de cette méthode est de développer son autonomie psychique et émotionnelle, de sorte que les exprimer ou non puisse devenir un choix que nous faisons par et pour nous-même, et non que d’autres font pour nous.

Crédit : Cormorans, par La Fille Renne <3

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